Traduction

dimanche 25 septembre 2016

Passages d'un livre

Crime et châtiment



"Selon sa conviction, cette éclipse de la raison et cette chute de la volonté se développent peu à peu et en arrivent à leur point suprême peu de temps avant l'accomplissement du crime ; elles continuent sous le même aspect au moment du crime et encore quelque temps après, selon l'individu; et puis elles passent comme n'importe quelle maladie. Quant à la question : est-ce la maladie qui engendre le crime, ou bien le crime lui-même qui, d'une façon ou d'une autre, par sa nature particulière, s'accompagne toujours de quelque chose comme une maladie ? il ne se sentait pas encore la force de la résoudre"

****

"Dounia leva le révolver, et, pâle comme la mort, la lèvre inférieure toute blanche, tremblante, ses grands yeux noirs étincelants comme une flamme, elle le regardait, résolue, mesurant et surveillant le moindre de ses gestes. Jamais encore il ne l'avait vue si belle. Le feu qui avait lui dans ses yeux à cet instant où elle avait levé le révolver l'avait entièrement brûlé, son cœur s'était serré avec douleur. Il fit un pas en avant, un coup de feu retentit. La balle lui glissa sur les cheveux et frappa le mur derrière lui. Il s'arrêta et eut un rire sans bruit :
    - Elle pique, cette guêpe ! Elle vise droit à la tête... Qu'est-ce que c'est ?  Du sang ?
Il sortit son mouchoir pour essuyer le sang qui coulait en mince filet le long de sa tempe droite ; la balle, visiblement, n'avait fait qu'effleurer le cuit chevelu. 
Dounia baissa le révolver et regardait Svidrigaïlov non pas avec effroi, mais pleine d'une sorte de stupeur frénétique. Elle-même, c'était comme si elle ne comprenait pas ce qu'elle venait de faire, ce qui était en train de se faire.
     - Eh bien, raté ! Tirez encore, j'attends, dit à voix basse Svidrigaïlov, ricanant toujours, mais d'une façon comme lugubre, sinon, j'aurai le temps de vous sauter dessus avant que vous vous remettiez en position !
Dounietchka tressaillit, arma très vite le chien et, une nouvelle fois, elle leva le révolver.
      - Laissez-moi ! dit-elle, d'une voix désespérée, je vous jure, je vais tirer encore... Je... tuerai ! 
    - Eh... à trois pas, c'est dur de ne pas tuer. Mais si vous ne tuez pas... alors... Ses yeux se mirent à briller, et il fit deux pas en avant.
Dounietchka tira - le révolver s'enraya. 
     - Vous avez mal chargé. Pas grave ! il vous reste encore un coup, là-dedans. Rechargez, j'attendrai.
Il se tenait devant elle, à deux pas, il attendait et la fixait avec une détermination frénétique, un regard passionné, enflammé, lourd. Douai comprit qu'il mourrait plutôt que de renoncer à elle. Et... bien sûr... elle allait le tuer, maintenant, à deux pas !
Soudain, elle jeta le révolver.
    - Elle l'a jeté ! murmura Svidrigaïlov avec surprise, et il reprit profondément son souffle. Quelque chose venait soudain de sortir de son cœur, et, peut-être, ce n'était pas seulement la peur mortelle ; d'ailleurs, la peur, il ne l'avait pas ressentie à ce moment-là. C'était une libération de quelque chose de tout autre, d'un sentiment plus douloureux, bien plus lugubre, qu'il n'avait lui-même pas la force de définir. "

                          Dostoïevski

lundi 5 septembre 2016

Pensée du jour



- Alors, pourquoi y aller ? ajouta Raskolnikov
- Et s'il n'y a plus personne, plus personne chez qui aller ! Il faut bien, quand même, non,  que chaque être ait quelque part où aller. Parce qu'un temps vient où c'est absolument qu'il faut un endroit où aller.


Crime et châtiment 


Fédor Dostoïevski






dimanche 4 septembre 2016

pensée du jour



Tout un programme de réflexion et d'écriture : 




 "Je cherche la région cruciale de l'âme ou le mal absolu s'oppose à la fraternité"


L'écriture ou la vie 1994


Jorge Semprún